1.
Puissance et gloire de Rome
Après
de nombreuses campagnes, les lieutenants de lempereur Octave-Auguste
sont enfin parvenus à mettre à la raison toutes les peuplades
ligures et alpines, assurant ainsi lindispensable sécurité
des communications terrestres, vers les provinces occidentales, la Narbonnaise
et les Espagnes.
Pour commémorer
ces victoires le Sénat et le Peupldécidèrent délever,
selon lusage, un arc de triomphe exceptionnel dédié
à leur empereur Auguste, considéré alors comme un
dieu.
Ce Trophée se dressera, symbole de puissance, à lextrémité
méridionale du massif alpin pacifié, sur le promontoire
dominant la mer, au point marquant la séparation entre lItalie
et Gaule, au miliaire 604 de la nouvelle route littorale, à labri
des neiges dhiver, construite par le gendre dAuguste, Agrippa,
et qui sera désignée «Via Julia-Augusta». Mais
aussi, emplacement privilégié du monde antique puisquil
évoque à la fois les origines mythiques avec «Hercule-Monoïkos»
et le glorieux passage de César juste avant la bataille de Pharsale.
Le Monument,
par ses dimensions grandioses devra perpétuer à jamais la
force et la splendeur de Rome: une base carrée de 35 mètres
de côté avec un premier niveau supportant une colonnade circulaire
de 24 colonnes doriques surmontée dune architrave, entourant
un énorme noyau central terminé par une sommité pyramidale.
Cinquante mètre,au sommet à la tête de la statue monumentale
dAuguste. Un immense rocher de calcaire reconstitué à
partir de deux carrières voisines...
La dédicace monumentale, gravée sur des plaques de marbre
de Carrare, du parement Ouest, dont le texte nous a été
transmis par Pline lAncien, précise la date dinauguration
au cours de la XVIIème puissance tribunitienne dAuguste,
cest à dire: entre le 1er juillet de lAn 7 avant J.C.
et le 30 juin de lAn 6 avant J.C.
Durant
la période romaine le Monument fut certainement protégé
et entretenu avec soin vu son importance symbolique, que ce soit durant
les épisodes tragiques des Césars, au «siècle
bienheureux» des Antonins, puis sous les Sévères,
et cours des premières
décennies du Bas-Empire.
2.
La destruction du mausolée du géant Apollon.
Au début
du Vème siècle ce seront surtout les premiers chrétiens
avec saint Honorat qui, en attribuant ce mausolée grandiose au
géant paën Appolon, infligeront au Trophée les plus
graves déprédations aux parties ornementales de loeuvre.
Ensuite le passage des barbares, Goths, Wisigoths, dut malmener loeuvre.
Puis ce sera au tour des Lombards à la fin du VIème siècle.
Après les incursions sarrasines, et ausortir des «temps obscurs»
du haut Moyen Age, pour expliquer cet impressionnant amoncellement de
ruines, le moine Raymond Féraud, au XIIIème siècle,
monta une oeubre épique en vers niçois: «La Vida de
San Honorat». Celle-ci, inspirée dun manuscrit antérieur,
raconte comment lintervention du saint fut décisive pour
ordonner la destruction «de la Tour du Géant». Cette
oeuvre devint par la suite linspiration de toutes les légendes
merveilleuses et imaginaires
sur le trophée dAuguste.
3.
La forteresse médiévale
A partir
de la fin du Xième siècle, alors quapparaît
le vocable « La Turbia», on transformera loeuvre ruinée
en forteresse avec un «Réduit» et les «domus»
accolées. Cet ensemble qui sera terminé en 1325 sera représenté
dans les volumes du «Theatrum Sabaudiae», à la gloire
de la Maison de Savoie, édité en Hollande en 1682, avec
une imagination du Trophée des Romains selon lhistorein niçois
de lépoque, Pierre Gioffredo.
A la fois bastion et refuge sur le «route la plus déserte»,
la forteresse gothique sera, sous les ducs de Savoie surtout, jusquà
la fin du XVIIème siècle, un élément du système
défensif du comté de Nice; ce qui justifie la nomination
dun gouverneur et la présence
dune garnison avec un capitaine, dont la mission était dassurer
la sécurité et la défense des communications.
4.
Le démantèlement de 1705
Malheureusement,
pour loeuvre, pendant les opérations militaires de la guerre
de la Succession despagne en comté de Nice, opposant les
troupes françaises du Roi soleil, Louis XIV, à celles du
duc de savoie, Victor-Amédée II, ce sera le démantèlement
du «forte» que nous trouvons relaté dans le livre de
raison de la famille Rossetto, notaires ducaux, et dont nous donnons le
passage décrivant lultime destruction: traduction proposée
du texte en italien: « Enfin le 4 mai 1705 deux nouvelles mines
sont placées au massif central, ce qui en fit tomber la moitié;
fait digne dêtre cité, car la Tour conservée
intacte, par les Français fut détruite.»
A travers
des bouleversements politiques, le «forte» rayé de
la carte, oublié, transformé en nouvel amoncellement de
ruines, de déblais, de matériaux, devint une immense carrière
ouverte à tous.
LEtat de Turin, sur intervention du «sindaco» (le maire)
fera entreprendre des travaux de consolidation du donjon et fera élever
un mur, en 1858/59, dit «mur sarde», pour empêcher le
scandaleuc pillager des matériaux.
Quelques
années après le Rattachement, le gouvernement impérial,
en 1865, classera le monument, ou plutôt, sa ruine.
5.
Restaurations
Au dernières
années du XIXème siècle nous notons un intérêt
marqué du monde savant, des académies, pour les travaux
darchéologie. La section de la Côye-dAzur de
la Société des Fouilles dont le Prince Albert Premier de
Mpnaco était le Président dhonneur, entreprendra avec
le concours de lEtat et du département, les travaux de dégagement
du Trophée.
Les fouilles se poursuivirent de 1905 à 1909. Loeuvre architecturale
dégagée de sa gangue informe recevra la visite du président
de la République Armand Fallières et de Georges Clémenceau,
marquant ainsi la reconnaissance officielle de la place importante du
Trophée dans le patrimoine architectural national. Elle couronnait
aussi linlassable travail quavait poursuivi lhistorien
local Philippe Casimir, alors conseiller municipal.
Ensuite, après un début de travaux, programmé dès
1910, qui amenèrent à la première mise en place de
deux colonnes en 1917, il fallut attendre 1929 pour que tous les projets
élaborés par larchitecte en chef Jules Formigé
pussent enfin être réalisés, grâce surtout à
lappui financier décisif de laméricain Edward
Tuck. Les travaux devaient se poursuivre jusquen 1933, suivis en
1934 de linauguration du musée de loeuvre, dénommé
Musée TUCK, en lhonneur du généreux mécène.
A partir
de 1946 un programme important dit « de dégagement des abords
du Trophée» fut entrepris, avec création dun
parc protégé incorporant les terrains avoisinants sur quelques
trois hectares. au sommet du vieux village historique.
Il faut
savoir quen 1953 une première convention de gestion fut établie
entre le secrétariat dEtat aux Beaux Arts et le Maire de
La Turbie « désireux de mieux assurer la protection des abords
du Trophée romain dAuguste à La Turbie et de mettre
pleinement en valeur ce monument particulièrement précieux
pour lhistoire et lart.» Ce sont les propres termes
de la Convention qui sont reproduits ici.
Présentement,
une nouvelle Convention a été enterinée le 4 août
1988 entre la Caisse Nationale des Monuments Historiques et des Sites
et la ville de La Turbie.
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